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Connaissance de soi et de l’autre par la pratique du tai chi chuan

Connaissance tai chi chuan

Connaissance par la prise conscience

Comme nombre de Voies traditionnelles, le tai chi chuan vise en fait à une meilleure connaissance de soi, des autres et du monde. Sa méthode quelque peu surprenante, nous ouvre en effet à l’essentiel. De façon paradoxale, sa lenteur constitue un moyen rapide de compréhension. Ses courbes nous offrent un accès direct au centre. Lenteur et continuité représentent un formidable moyen de prise de conscience de nos actes. Elles favorisent également l’éveil de notre être, l’évaluation de nos dysharmonies.

Les maîtres refusent par ailleurs les « trucs » et recettes. Lorsqu’on les questionne sur l’efficience de leur pratique, ils répondent « Il s’agit de se connaître soi-même et de connaître l’autre ». Au premier degré, nous pouvons penser que le maître n’écoute pas, qu’il est borné, qu’il a un problème de communication … ou pire qu’il ne sait pas, qu’il n’est qu’un imposteur. Par ce détour, l’initié initie ainsi un questionnement. Il invite donc à un détour, donne à penser.

Appropriation progressive

L’accès à cette connaissance passe par la répétition. Pour Jérôme Ravenet la répétition est tout le contraire du ressassement ; elle est savouration, c’est-à-dire le processus d’intériorisation ou d’appropriation du savoir ». Cette appropriation ne se fait pas d’un seul coup. Elle résulte d’une pratique régulière au cours de laquelle, le pratiquant se familiarise avec les mouvements tout autant qu’avec le mode de faire.  Il apprend d’abord à faire autrement, ensuite à faire moins. Que d’efforts pour arriver au non effort ! Que d’artifices pour retrouver le naturel ! Le plus grand chef d’œuvre de la calligraphie chinoise, la Préface au recueil du pavillon des Orchidées de Wang Xizhi, contient des ratures. La tradition privilégie la puissance et l’énergie contenue dans le tracé/le geste. Le « raté » devient le témoin de l’authenticité de la démarche.

Connaissance incorporée et incorporante

La connaissance proposée n’est pas analyse de soi mais disponibilité, oubli de soi pour s’adapter à l’autre, à la situation. Par une augmentation de notre capacité d’attention, nous développons la possibilité d’exploiter les potentialités inhérentes à chaque situation. Ce type de connaissance, plutôt que d’isoler et séparer, recontextualise. Cette connaissance incorporée et incorporante, à la différence d’un savoir abstrait, (se) nourrit (dans) nos relations aux autres, (dans) nos interactions avec le monde. Le taijiquan ne dévoile pas une vérité donnée à priori, il offre la véracité d’une expérience vécue.

Édito revu Espace Taiji n° 75

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Crédit photo : Alain Kerkhofs